jeudi 16 juin 2016

SOURCES UTILES A LIRE




  
Le sort des cr´ances post´rieures en droit francais etee
droit de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique
            du droit des Aaires (OHADA) .

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THÈSE

En vue de l’obtention du
DOCTORAT EN DROIT
Présentée et soutenue par Harouna SALEY SIDIBÉ
Le 30 septembre 2013 à 14h30
Titre :
 LE SORT DES CREANCES POSTERIEURES EN DROIT FRANÇAIS ET EN
DROIT DE L’ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU
                 DROIT DES AFFAIRES (OHADA)


SOMMAIRE
(Une table des matières figure à la fin de l’ouvrage ; les chiffres renvoient aux numéros de
pages)
LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS ............................................................. V
SOMMAIRE ................................................................................................................... XI
INTRODUCTION .......................................................................................................... 1
PREMIERE PARTIE ................................................................................................... 20
LE PERIMETRE DES CREANCES POSTERIEURES EN DROIT FRANÇAIS
ET EN DROIT DE L’OHADA .................................................................................... 20
TITRE I : LES CRITERES CLASSIQUES DE LA NAISSANCE DES
CREANCES POSTERIEURES................................................................................... 25
CHAPITRE I : LE CRITERE CHRONOLOGIQUE ................................................... 26
CHAPITRE II : LE CRITERE ORGANIQUE............................................................. 91
CONCLUSION DU TITRE I ....................................................................................... 161
TITRE II : L’ADJONCTION DE CRITERES SPECIFIQUES D’UTILITE DE LA
CREANCE POSTERIEURE ..................................................................................... 162
CHAPITRE I : LES CRITERES DE LA FINALITE DE LA PROCEDURE
COLLECTIVE .............................................................................................................. 164
CHAPITRE II : L’INFLUENCE RELATIVE DES CRITERES DE NAISSANCE DE
LA CREANCE POSTERIEURE SUR CERTAINES CREANCES ............................ 200
CONCLUSION DU TITRE II ...................................................................................... 230
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE ............................................................ 231
DEUXIEME PARTIE ................................................................................................ 233
LE REGIME JURIDIQUE APPLICABLE AUX CREANCES POSTERIEURES
EN DROIT FRANÇAIS ET EN DROIT DE L’OHADA ........................................ 233
TITRE I : LA REGLE PRINCIPALE DU PAIEMENT A L’ECHEANCE ......... 236
CHAPITRE I : L’EXPOSE DE LA REGLE PRINCIPALE DU PAIEMENT A
L’ECHEANCE ............................................................................................................. 237
CHAPITRE II : LA MISE EN ŒUVRE DE LA REGLE PRINCIPALE DU
PAIEMENT A L’ECHEANCE : LE DROIT DE POURSUITE DES CREANCES
POSTERIEURES.......................................................................................................... 269
CONCLUSION DU TITRE I ....................................................................................... 315
TITRE II : LA REGLE SUBSIDIAIRE DU PAIEMENT PAR PREFERENCE 316

CHAPITRE I : L’EXPOSE DE LA REGLE SUBSIDIAIRE DU PAIEMENT PAR
PREFERENCE ............................................................................................................. 318
CHAPITRE II : LA MISE EN ŒUVRE DU PAIEMENT PAR PREFERENCE : LE
CLASSEMENT DES CREANCES POSTERIEURES ................................................ 362
CONCLUSION DU TITRE II ...................................................................................... 419
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE ........................................................... 420
CONCLUSION GENERALE .................................................................................... 421
BIBLIOGRAPHIE GENERALE .............................................................................. 426
ANNEXES ................................................................................................................... 451
TABLE DES MATIERES .......................................................................................... 472


INTRODUCTION

« Licet alicui, adjiciendo sibi creditorem, creditoris sui deteriorem fecere conditionem »
[Il est permis à quiconque d’aggraver la condition de ses créanciers en s’en créant de nouveaux]
                                                                            (Adage de droit romain)
1.
Le colonel Douglas MORTIMER, personnage de fiction joué par Lee VAN
CLEEF, affirmait à l’attention de son débiteur : « Je suis un créancier très patient.
Quand le moment est venu, je me fais payer, quoiqu’il arrive »1. Bien que tirée d’une
fiction ironiquement surnommée « Western Spaghetti », cette affirmation régit fort bien
la situation des créanciers postérieurs au jugement d’ouverture d’une procédure
collective.
2.
En effet, la procédure collective peut être appréhendée comme une action en
justice qui place toute personne physique ou morale de droit privé exerçant une activité
économique, et se trouvant en cessation des paiements ou menacée par la cessation des
paiements, sous le contrôle de la justice en la faisant bénéficier de la suspension des
poursuites. Cette situation de suspension des poursuites est opposée à un grand nombre
de créanciers qui jouxtent la procédure.
3.
A ce dessein, le droit de la faillite avait pour champ d’application rationae
personae, les personnes bénéficiaires du statut de commerçant, tout en s’appuyant sur
une logique d’élimination du failli2. Ce dernier était purement et simplement écarté par
la mise en œuvre d’une procédure de répartition de ses biens entre les créanciers. C’est
pour cette raison que le terme de banqueroute concrétisait le droit de la faillite, puisqu’il
est d’origine italienne, « banca rota » et consistait à briser le banc du commerçant qui
ne payait pas ses dettes en vue de l’écarter, par conséquent, du marché. La philosophie
de l’époque était sous-tendue par le caractère infamant de la faillite. De ce fait,
jusqu’aux législations modernes, le but de la faillite était de payer les créanciers, sans
1
  S. LEONE, Et pour quelques dollars de plus, 30 septembre 1965, Italie/Espagne/Allemagne de l’Ouest,
126 mn.
2E. ROUCOLLE, Histoire du droit de la faillite en France : Une approche des représentations de la
défaillance, XIème Conférence de l’Association Internationale de management Stratégique, 13-14-15 juin
2001, Faculté des Sciences de l’administration, Université Laval, Québec.
que les circonstances entourant la situation du débiteur soient prises en compte. 
Dans le 
droit moderne des difficultés d’entreprise, à l’ouverture d’une procédure collective, les
créanciers sont, a priori, tous soumis aux règles rigoureuses de la discipline collective
qui limitent leur pouvoir d’action contre le débiteur en difficulté.
Les procédures collectives en tant que procédures consistant à déceler et à traiter les
difficultés que rencontre une entreprise ont toujours existé, mais elles se sont accentuées
avec les crises financières subséquentes3.
4.
Actuellement, les difficultés des entreprises ont pris de l’ampleur avec la crise
mondiale qui sévit depuis 2007. En effet, la crise mondiale a débuté en juillet 2007 et
s’est matérialisée par une crise de liquidité et de solvabilité tant au niveau des banques
que de l’amenuisement du crédit aux entreprises4. La crise a atteint son paroxysme
pendant l’automne 2008 en provoquant une chute des cours des marchés boursiers et la
faillite de plusieurs établissements financiers.
Ainsi, la crise ayant démarré aux Etats unis s’est, par la suite, étendue à l’Europe avant
de s’internationaliser et de toucher le monde entier. En se référant aux statistiques de
cette période, il est aisé de dire que la France a été sévèrement heurtée, surtout que la
France ne bénéficiait déjà pas d’un bon positionnement dans le classement mondial des
pays compétitifs5. L’internationalisation de cette crise n’a pas également épargné les
Etats membre de l’OHADA. Bien que certains experts comme Madame Yolande
DUHEM, directrice Afrique de l’Ouest et du Centre de la Société financière
internationale (SFI)6, aient longtemps considéré que la crise n’aura pas d’impacts
considérables en Afrique, la situation de certaines entreprises africaines s’est
considérablement détériorée. Cependant, il faut reconnaître que ces difficultés sont plus
structurelles et de gestion que liées à la crise.
Néanmoins, Madame DUHEM a précisé que : « (les) réformes de l’OHADA devraient
permettre (aux) 16 pays francophones (actuellement l’OHADA compte 17 Etats
3
  
M. MENJUCQ, Une rentrée de crise..., Rev. proc. coll. n° 5, Septembre 2012, repère 5. Ch.
DELATTRE, La crise économique peut-elle exonérer le dirigeant de ses responsabilités ?, Rev. proc.
coll. n° 5, Septembre 2012, alerte 25.
4V. l’ouvrage : H. BOURGUINAT et E. BRIYS, L'arrogance de la finance : comment la théorie
financière a produit le krach, Paris : La Découverte 2009.
5F. SAINT-CAST, Impact de la crise sur les entreprises, site Internet des Echos, 29 janvier 2012.
6La Société financière internationale est l’institution du Groupe de la Banque mondiale chargée des
opérations avec le secteur privé.

membres) de dépasser leur niveau de progression (…) ». Cette affirmation est d’ailleurs
confirmée par la croissance des pays membres de l’OHADA dans le classement issu du
rapport Doing Business dans lequel la Banque Mondiale et la Société financière
internationales saluent les réformes instituées par les Etats parties7.
5.
Un bref aperçu des défaillances des entreprises permet de se rendre compte que
dès 2008, la crise économique a occasionné une hausse des liquidations et
redressements judiciaires, parce que les Petites et Moyennes Entreprises (PME) ont été
les premières touchées par la crise. En France, au cours de l’année 2008, les jugements
d’ouverture de procédures collectives ont connu une hausse de 11% et près du trois-
quarts des procédures collectives ouvertes ont directement été des liquidations
judiciaires8. Ces chiffres permettent de mesurer l’effet de la crise sur les PME du
secteur privé.
6.
De manière générale, le principe veut que les droits des créanciers antérieurs
soient gelés par l’effet du jugement d’ouverture et qu’ils se soumettent à une discipline
dite collective requérant d’importants sacrifices. Subséquemment, les créanciers
antérieurs ou dans la masse ne peuvent recevoir le paiement de leurs créances et la règle
de l’arrêt des poursuites individuelles leur est applicable. En outre, cette catégorie de
créanciers ne peut solliciter l’inscription d’une mesure d’exécution,
concernée par la suspension du cours des intérêts.
7.
L’ensemble des règles constituant la discipline collective a été prescrit en vue
tout en étant
d’asseoir un principe dit de l’égalité entre les créanciers. L’égalité entre les créanciers
est un principe d’ordre public qui se fonde sur le quasi-slogan : « une procédure
collective pour un intérêt collectif qui garantit une protection de l’intérêt général »9. En
effet, le principe de l’égalité entre les créanciers est un principe constitutionnel10 qui
n’est pas explicitement repris en droit privé dans la mesure où le Doyen
7
  
I. FEVILIYE, Le rapport Doing Business 2010 : Le rapport Doing Business de la Banque Mondiale sur
l’environnement des affaires : « Réformer en période difficile », RCDA octobre-décembre 2009, n°1,
p.41-43. Ce rapport consiste à une série de rapports annuels de la Banque Mondiale sur les
réglementations qui facilitent la pratique des affaires et celles qui la compliquent. V. également, Revue
MIDAA, Cabinet Lazareff-Lebars, p.12.
8J. LAURENT, Les tribunaux de commerce plus sollicités en raison de la crise économique, l’année
économique et sociale 2008, Dossier n°154.
9G. COLLIN, J.C. GUILLERAT et B. MOUNIER, L’égalité des créanciers dans les procédures
collectives, 25 janvier 2003.
10M. CABRILLAC, Les ambigüités de l’égalité entre les créanciers, Mélanges BRETON DERRIDA, D.
1991, p.31. Voir également la devise de la République Française : « Liberté-Egalité-Fraternité».


CARBONNIER précisait que : « Il ne faut pas confondre l’égalité générale, à 
l’intérieur de la nation (visée par la constitution et la devise de la République
Française) avec les égalités particulières, jouant à l’intérieur des groupes restreints
(égalité des créanciers et des héritiers entre autres) »11. Seulement, le principe de
l’égalité entre les créanciers comporte des exceptions parmi lesquelles le sort des
créances postérieures.
8.
Monsieur Serge BRAUDO, dans son dictionnaire électronique de droit privé
français, définit la « créance » comme un droit qu’une personne, le « créancier »,
détient à l'encontre d'une autre personne appelée le « débiteur » qui lui doit la fourniture
d'une prestation12. Or, une même prestation peut concerner plusieurs créanciers ou
plusieurs débiteurs ou les deux à la fois, puisque le débiteur est l'obligé du créancier. De
la sorte, l'objet de la créance consiste en une obligation, soit de donner, soit de faire,
soit encore de s'abstenir de faire13. Habituellement, on oppose la créance qui est un droit
de caractère personnel au droit de propriété qu'on dit, à tort ou à raison, être un droit sur
la chose14. En matière commerciale, le redressement judiciaire a été édifié pour assurer
la garantie des emplois, tenter la sauvegarde de l'entreprise et pour, à défaut d'avoir pu
parvenir au redressement de l'entreprise, chercher dans la liquidation, le meilleur moyen
de protéger l'intérêt des créanciers. Ce qui fait de la créance, le socle du droit des
entreprises en difficulté. La créance postérieure, quant à elle, est propre au droit des
procédures collectives, dans la mesure où ce substantif concerne la créance dont la
naissance est postérieure à la date du jugement d’ouverture. En France, le Code de
commerce détermine la créance postérieure dans ses articles L622-17-I et L641-13-I,
modifiés par l’ordonnance du 18 décembre 2008, qui prévoient respectivement que :
11
  
Cf. A. STASI, Les créanciers postérieurs confrontés au redressement en droit français et en droit
italien, thèse de doctorat en droit, Université Nice Sophia Antipolis, 2011, n°316, p.247.
12http://www.dictionnaire-juridique.com/serge-braudo.php.
13M. BILLIAU, J. GHESTIN et G. LOISEAU, Traité de droit civil. Le régime des créances et des dettes,
édit LGDJ.
14Il existe un débat doctrinal sur la question de l’opposition entre le droit réel et le droit personnel. Le
droit réel s’exerçant directement sur la chose, est absolu, en ce sens qu’il peut être opposé par son titulaire
à toutes autres personnes (« erga omnes »), mais il ne peut l’être que sous une forme négative. Les tiers
doivent respecter ce droit qui ne peut être méconnu par autrui, mais le titulaire ne peut exiger d’eux aucun
acte positif. Quant au droit personnel, il n’est opposable qu’aux parties contractantes c’est à dire qu’il
n’établit de rapports qu’entre le créancier et le débiteur, c’est seulement de ce dernier que le créancier
peut exiger la prestation, objet du droit. Le droit personnel est dit relatif. La différence entre l’absolutisme
du droit réel d’où découle son opposabilité « erga omnes » et la relativité du droit personnel doit toutefois
être nuancée. Certes, le droit personnel n’oblige pas les tiers mais il existe à leur égard et comme tout
droit subjectif, il doit être respecté par tous. D’autre part, le droit réel ne peut être opposable que si l’acte
constitutif ou translatif du droit a été publié, surtout en matière immobilière
« Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du
déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une
prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ».
Et
« Sont payées à leur échéance les créances nées régulièrement après le jugement qui
ouvre ou prononce la liquidation judiciaire pour les besoins du déroulement de la
procédure ou du maintien provisoire de l'activité autorisé en application de l'article L
641-10 ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant ce maintien de
l'activité ».
L’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif,
issu de la réglementation de l’OHADA, s’est également intéressé à la notion de créance
postérieure dans une terminologie assez différente, puisque l’article 117 dudit Acte
uniforme prévoit que : « Toutes les dettes nées régulièrement, après la décision
d'ouverture, de la continuation de l'activité et de toute activité régulière du débiteur ou
du syndic, sont des créances contre la masse (…) ».
En tout état de cause, la notion de créance postérieure est étroitement liée à celle de
continuation de l’entreprise en difficulté.
9.
En effet, toutes les difficultés de l’entreprise ne sont pas censées conduire
directement au démantèlement immédiat de la structure de production, puisque la
prévention, la sauvegarde et le redressement judiciaire de l’entreprise, dans le droit
moderne des procédures collectives, sont des procédures permettant de résoudre les
difficultés ou de réorganiser l’entreprise en vue de sa reprise par un tiers. C’est dans ce
cadre qu’intervient la continuation de l’entreprise en tant que mesure permettant une
continuation de l’exploitation en vue du redressement de l’unité de production ou de sa
revente in fine. C’est pour toutes ces raisons que le régime applicable aux créances
postérieures vise à favoriser les partenaires de l’entreprise qui acceptent de
l’accompagner tout au long de la procédure, en leur octroyant une faveur, voire une
garantie de paiement15.
15
  
J. AZEMA, R. BESNARD-GOUDET et Alii, Dictionnaire de droit des affaires, Dictionnaires de Droit,
Ellipses, p.154.

10. 
Au regard de tout ce qui précède, la présente recherche a pour ambition
d’évaluer le sort des créances postérieures dans le cadre d’une méthode comparative,
puisque deux systèmes juridiques élaborés dans deux zones géographiques différentes, à
savoir la France et la zone constituée par les pays membres de l’Organisation pour
l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), seront le point focal de ce
travail de recherches.
Une possible ressemblance entre les deux législations objet de la présente étude peut
être évoquée dans la mesure où des raisons historiques établissent une identité des
principes généraux du droit de la faillite, puis du droit des procédures collectives.
Cependant, le contexte économique a été déterminant dans l’évolution des deux
législations étant donné que la distinction entre les pays en voie de développement et les
pays développés a introduit une dissension entre l’AUPC et la loi de sauvegarde des
entreprises. D’ailleurs, en France, la loi américaine et plus précisément le chapter
eleven de la loi sur les faillites aux Etats Unis a servi, indirectement, de modèle à
l’élaboration de la loi de sauvegarde des entreprises16. Cette incursion de l’esprit du
droit américain dans la loi de sauvegarde des entreprises sous-tend la rupture entre le
droit français et le droit de l’OHADA des entreprises en difficulté.
Nos propos s’intéressant aussi bien au droit français qu’au droit de l’OHADA, il est dès
lors opportun de commencer par examiner l’Organisation pour l’Harmonisation en
Afrique du Droit des Affaires (OHADA).
11.
L’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires est une
organisation internationale économique créée par le Traité signé à Port Louis (Ile
Maurice) le 17 octobre 1993 et révisé par le Traité de Québec (Canada) du 17 octobre
2008.
Cette organisation internationale, au sens du droit international, est composée
actuellement de dix sept (17) Etats membres, à savoir le Bénin ; le Burkina-Faso ; le
Cameroun ; la Centrafrique ; la Côte d'Ivoire ; le Congo ; les Comores ; le Gabon ; la
Guinée ; la Guinée-Bissau ; la Guinée-Équatoriale, le Mali ; le Niger ; la République
16
  Cette filiation entre le droit français et droit américain doit être nuancée dans la mesure où la
contractualisation est le maître mot de la loi américaine. Ce qui n’est pas encore le cas en FranceDémocratique du Congo (entrée en vigueur du Traité le 12 septembre 2012) ; le
Sénégal ; le Tchad et le Togo17.
L’OHADA a mis en place plusieurs institutions permettant son fonctionnement normal.
Il s’agit, premièrement, du Conseil des Ministres composé des ministres chargés de la
Justice et des ministres des Finances, il se réunit au moins une fois par an, sur
convocation de son Président, à l'initiative de celui-ci ou du tiers des États Parties, et ne
peut valablement délibérer que si deux tiers au moins des États Parties sont représentés.
La présidence est exercée à tour de rôle par chaque partie pour une durée d'un an dans
l'ordre alphabétique des pays.
Deuxièmement, le Secrétariat Permanent qui est l'organe exécutif de l'OHADA, ses
principales attributions sont d’assister le Conseil des Ministres et de coordonner les
activités des institutions ; de préparer et suivre la procédure d'adoption des Actes
Uniformes ; de publier les Actes Uniformes au Journal Officiel de l'OHADA et
d’exercer la tutelle sur l'École Régionale Supérieure de la Magistrature (ERSUMA).
Troisièmement, L'Ecole Régionale Supérieure de la Magistrature (ERSUMA) est
chargée d'assurer la formation et le perfectionnement des magistrats et des auxiliaires de
justice des Etats membres en droit harmonisé et en droit des affaires. Elle constitue,
également, un centre de documentation et de recherche en matière juridique et
judiciaire.
Quatrièmement, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) joue le rôle de
l’organe juridictionnel, clé de voûte de la réglementation OHADA.
Enfin, la Conférence des chefs d’Etats et de gouvernement ajouté par le Traité révisé est
présidée par le Chef de l’Etat ou du Gouvernement dont le pays assure la présidence du
Conseil des Ministres. Elle se réunit si besoin sur convocation de son Président, à son
initiative ou à celle du tiers des Etats parties. Elle statue sur toute question relative au
Traité et ne délibère valablement que si les deux tiers des Etats parties ont été
représentés. Ses décisions sont prises par consensus ou, à défaut, à la majorité absolue
des Etats présents.
17
V. annexe, la cartographie des Etats membres de l’OHADA12. 
Découle de ce bref aperçu, la question cruciale de savoir si le droit de l’OHADA
est formellement un droit harmonisé comme l’indique son intitulé intégral.
Cette question sous-tend la problématique de la nature communautaire du droit de
l’OHADA parce qu’il est facile de considérer, de prime abord, les règles distillées par
l’OHADA, de droit communautaire, surtout lorsque le juge Kéba MBAYE affirmait
que l’OHADA est « une intégration juridique qui doit préparer avec d’autres
organisations la consolidation de l’Union africaine par une intégration économique »18.
Mais, pour un auteur, eu égard au silence du Traité de Port Louis, même révisé, quant à
la nature de l’OHADA et à la prise en considération de la conception restrictive des
actes constitutifs des organisations internationales, il s’agit davantage d’une
organisation de coopération interétatique19.
Le droit de l’OHADA entretient des rapports plus ou moins étroits avec les différents
systèmes de droit dont il s’inspire, pour créer son modèle juridique spécifique. Cette
spécificité permet au droit de l’OHADA, en plus de s’inspirer des autres systèmes
juridiques, d’intégrer les règles de droit africain antérieur et d’opérer un renvoi aux
réalités africaines, malgré leur caractère épars20. De ce fait, selon un auteur, « plus
qu’un droit uniforme, l’OHADA institue un véritable système juridique pourvu
d’institutions propres (dont) l’autonomie institutionnelle est encore confortée par la
création d’un organe juridictionnel chargé d’assurer la cohérence de l’ensemble du
système »21.
Pour déterminer la nature du droit secrété par l’OHADA, un bref détour par les
différents modes d’intégration juridique, à savoir l’harmonisation, l’unification et
l’uniformisation, s’impose.
En premier lieu, le mot « harmonisation » provient du latin harmonia et matérialise un
simple rapprochement entre deux ou plusieurs systèmes juridiques afin de réduire et de
18

  K. MBAYE, préface à B. MARTOR et alii, Le droit africain des affaires issu de l’OHADA, LITEC, 2e
éd., 2009.
19I. KAMDEM FETZE, Harmonisation, unification et uniformisation. Plaidoyer pour un discours affiné
sur les moyens d’intégration juridique, 43 R.J.T. 605, 2009.
20S. DOUMBE-BILLE, A propos de la nature de l’OHADA, Mélanges offerts à Majid BENCHIKH, éd.
Pedone.
21G. NGOUMTSA ANOU, Droit OHADA et conflit des lois, Thèse de doctorat en droit, Université Jean
Moulin – Lyon 3, novembre 2009.

supprimer certaines contradictions22. Selon un auteur, « l’harmonisation est un moyen 
qui sert à établir les grandes lignes d’un cadre juridique en laissant aux différentes
parties prenantes à l’intégration le soin de compléter l’ossature commune par des
dispositions qui correspondent mieux à leurs valeurs, à leurs préférences ou à leur
niveau de développement »23.
En deuxième lieu, l’unification est une combinaison des mots latins unus24et facere25 et
désigne l’action de rendre semblables plusieurs éléments rassemblés pour former un
tout unique26.
L’unification apparaît dès lors comme le fait d’instaurer, dans une
matière juridique, une réglementation détaillée et identique dans tous ses points, pour
tous les Etats membres, tout en leur transférant une marge de manœuvre quant aux
modalités de mise en œuvre des normes communes27.
En dernier lieu, l’uniformisation, quant à elle, est formée par les mots latins unus et
forma28 et permet de donner une forme commune à un ensemble d’éléments ayant des
parties identiques entre elles29. De manière concrète, un auteur donne un exemple de
l’uniformisation qui consiste dans le fait que : « les États impliqués dans une
intégration se dotent d’un corps de normes uniformes et détaillées contenu dans un
instrument unique. (…) c’est ce support commun à tous les intervenants à une
intégration juridique qui fait la particularité de l’uniformisation et la distingue de
l’unification »30.
22
   G. CORNU, Vocabulaire juridique, Paris, Quadrige / PUF, 2000, p. 423 ; É. LITTRÉ, Dictionnaire de
la langue française, t. 7, Paris, Gallimard, Hachette, 1971, p. 417-421 ; M. BOODMAN, The Myth of
Harmonization of Laws, 39 Am. J. Comp. L. 699, 700-702, 1991 et J. ISSA-SAYEGH, Quelques aspects
techniques de l’intégration juridique : l’exemple des actes uniformes de l’OHADA, Rev. Dr. Uniforme
n°5 ,1999 : « L’aspect musical de cette définition est plus édifiant : harmoniser consiste à faire en sorte
que toutes les parties concourent à un même but ou à un même effet mélodieux ».
23I. FETZE KAMDEM, op. cit., R.J.T 605, 2009.
24Qui signifie « un ».
25Qui signifie « faire ».
26É. LITTRÉ, op. cit., p. 1450.
27L’article 249 (ex art. 189) du Traité instituant la Communauté économique européenne signé à Rome le
25 mars 1957, JOCE 340 du 10 novembre 1997, p. 173- 308 : « une directive a certes un effet obligatoire
à l’égard de tous les États membres. Toutefois chacun de ces États a la faculté de choisir la forme et les
moyens les mieux appropriés pour assurer l’exécution des dispositions de ladite directive.
Théoriquement, un traité de droit international constitue un autre exemple d’unification. Cependant les
États profitent souvent du pouvoir qui leur est reconnu de choisir le support d’expression de leur
consentement à un traité pour y apporter des ajustements substantiels ».
28Qui signifie « forme ».
29É. LITTRÉ, op. cit., p. 1450 et 1451.
30I. KAMDEM FETZE, op. cit.

Le cas de l’OHADA est peu commun, puisque d’une part, les Actes Uniformes sont 
formulés d’une manière règlementaire et d’autre part, leur entrée en vigueur ne fait pas
appel aux autorités législatives nationales, mais au Conseil des ministres en tant
qu’institution de l’OHADA. Ainsi, toutes ces particularités permettent de dire que
l’OHADA, malgré l’utilisation du mot « harmonisation » dans sa dénomination
générale, n’est pas un droit harmonisé, mais un droit uniforme, fruit d’une
uniformisation.
13.
En tout état de cause, la réglementation portée par l’OHADA comprend, parmi
31
une multitude de matières, les procédures collectives d’apurement du passif
entreprises en difficulté est passé par plusieurs transmutations législatives.
14.
. Aussi
bien en France que dans les Etats actuellement membres de l’OHADA, le droit des
En France, plusieurs lois aussi importantes les unes que les autres se sont
succédées pour créer le droit positif moderne des entreprises en difficulté. Le Code de
commerce de 1807 comportait des dispositions sur la banqueroute qui permettait
d’incarcérer le débiteur en faillite, d’où la critique selon laquelle ce système inquiétait
plus le commerçant et en cela freinait l’activité commerciale.
La loi du 4 mars 1889 sur la faillite et la liquidation judiciaire laissait au débiteur la
possibilité de redresser son entreprise au moyen d’un concordat passé avec les
créanciers. Cette loi mettait au cœur du redressement de l’entreprise la bonne foi du
débiteur. Ainsi, le débiteur de bonne foi était soumis à la liquidation judicaire et le
débiteur de mauvaise foi succombait à la faillite. De ce fait, ce sont la lenteur et le tardif
désintéressement des créanciers qui ont sonné le glas de cette loi qui fut modifiée par le
décret du 20 mai 1955.
Ce décret a permis d’introduire un changement terminologique et idéologique dans les
procédures collectives. En ce sens, la procédure de règlement judicaire est devenue le
31
   Il faut surtout souligner que dans le cadre de l’OHADA, la porte n’est pas fermée à l’introduction de
nouvelles matières, d’où des projets d’Acte Uniforme portant d’une part, sur le droit du travail et d’autre
part, sur le droit du contrat. Article 2 du Traité de Port Louis prévoit à cet effet que : « Pour l’application
du présent Traité, entrent dans le domaine du droit des affaires l’ensemble des règles relatives au droit
des sociétés et ai statut juridique des commerçants, au recouvrement des créances, aux sûretés et aux
voies d’exécution, au régime du redressement des entreprises et de la liquidation judicaire, au droit de
l’arbitrage, au droit du travail, au droit comptable, au droit de la vente et des transports, et toute autre
matière que le Conseil des Ministres déciderait, à l’unanimité, d’y inclure, conformément à l’objet du
présent Traité et aux dispositions de l’article 8 ci-après (sur la procédure d’adoption des actes
uniformes) ».

principe et la faillite l’exception n’intervenant que lorsque le débiteur s’est rendu
coupable d’agissements douteux ou lorsqu’il est de mauvaise foi.
La loi du 13 juillet 1967 a abrogé toutes les dispositions antérieures en permettant de
soumettre l’entreprise pouvant être redressée à la procédure de règlement judiciaire et
celle dont la situation est irrémédiablement compromise, à la procédure de liquidation
judiciaire32. Cette modification ajoute, à côté du critère économique pour l’entreprise,
un critère moral pour les dirigeants par le biais des sanctions civiles, patrimoniales et
pénales prises en son encontre.
L’ordonnance du 23 septembre 1967 a créé une procédure de suspension provisoire des
poursuites réservée aux grandes entreprises n’étant pas encore en cessation des
paiements et dont la disparition pourrait causer un trouble grave à l’économie nationale
ou régionale. Cette ordonnance fut abrogée et remplacée d’une part, par la loi du 1 er
mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des
entreprises et d’autre part, par la loi du 25 janvier 1985 permettant le redressement de
l’entreprise et la sauvegarde de l’emploi. Cette dernière est aussi connue pour avoir
instauré un traitement différencié et favorable aux créanciers postérieurs alors désignés
en tant que créanciers de l’article 40. D’ailleurs, cette appellation est encore utilisée
dans le langage des praticiens des procédures collectives.
La loi du 10 juin 1994 vient modifier les lois de 1984 et de 1985 en inscrivant parmi ses
objectifs, l’amélioration du sort des créanciers.
L’innovation a été introduite par une réglementation moderne élaborée par le législateur
français, il s’agit de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 dite de sauvegarde des
entreprises. Elle-même modifiée, voire plutôt clarifiée dans certaines de ses dispositions
par l’ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 portant réforme du droit des
entreprises en difficulté.
Le décret n°2009-160 du 12 février 2009 entré en vigueur le 15 février 2009, a complété
cette ordonnance. Il porte également modification des procédures de saisie immobilière
et de distribution du prix d'un immeuble.
32

  F. DERRIDA, P. GODE et J.-P. SORTAIS, Redressement et liquidation judiciaires des entreprises,
cinq années d’application de la loi du 25 janvier 1985, 3e éd., D.1991, p. 1.Le 4 mars 2011, le décret pour l’application de la Sauvegarde Financière Accélérée 
(SFA) a été publié apportant des précisions sur les procédures de restructuration
financière des entreprises.
15.
Les pays actuellement membres de l’OHADA n’ont pas connu cette frénésie
législative édifiée par le législateur français, concernant le droit des entreprises en
difficulté33.
En effet, jusqu’à l’entrée en vigueur de l’Acte Uniforme organisant les procédures
collectives d’apurement du passif, la plupart des Etats actuellement membres de
l’OHADA ont appliqué la loi française du 4 mars 1889 héritée de la période coloniale34.
La vétusté de cette législation a aiguillé certains Etats vers l’entreprise d’un processus
de révision plus ou moins réussie de leur législation nationale sur les procédures
collectives35. Il faut en outre ajouté à cette vétusté, la méconnaissance des procédures
collectives par la plupart des systèmes juridiques coutumiers africains, ceci pose la
question des difficultés de la réception des techniques juridiques dans l’ordre socio-
économique local36. En cela, les premières remarques ont sonné le glas des textes
législatifs antérieurs, d’où la mise en place urgente d’un système moderne de traitement
des situations d’insolvabilité par la plupart des Etats de l’Afrique francophone.
C’est le cas notamment du Sénégal qui a adopté la loi n°76-60 du 12 juin 1976
complétée par le décret d’application n°76-781 du 23 juin 1976 et du Mali où les
articles 173 à 315 du Code de commerce ont repris les dispositions de la loi française du
13 juillet 1967.
33
   L’inflation normative est une des caractéristiques générales du système juridique français. Pour plus de
détails v., A. LAMBERT et J.-C., BOULARD, Rapport de la mission de lutte contre l’inflation
normative, ministère de la réforme de l’état de la décentralisation et de la fonction publique, ministère
délégué chargé de la décentralisation, 26 mars 2013.
34L’arsenal juridique applicable était composé du Code de commerce de 1807 tel que refondu par la loi
du 28 mai 1938, de la loi du 4 mars 1889 sur la liquidation judiciaire et des décrets-lois du 8 aout et du 30
octobre 1935.
35Ce vent de réformes peut être exprimé par l’affirmation selon laquelle : « Il vient (…) toujours un
moment où, si bien conçus, si bien rédigés qu’ils soient, (les textes) cessent de répondre aux besoins et
doivent disparaître. Ce sont des solutions provisoires, soumises (…) à la loi universelle du changement »,
H. LEVY BRUHL, Rapport aux travaux du 4e colloque des facultés de droit et sciences économiques,
Droit-Economie-Sociologie, annales de la faculté de droit et sciences économiques de Toulouse, Paris,
D.1959, p.80.
36D. ABARCHI, Pour une adaptation du droit nigérien des procédures collectives, à l’évolution
socioéconomique, thèse de doctorat en Droit Privé, Université d’Orléans, 1990.


PREMIERE PARTIE

                LE PERIMETRE DES CREANCES POSTERIEURES EN
                           DROIT FRANÇAIS ET EN DROIT DE L’OHADA

25. 

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